Il y a plus d’un an, j’écoutais Richard Wallis interviewant JP Rangaswami. À une époque où la question du piratage occupe beaucoup les discussions en lien avec le monde numérique, une citation de Rangaswami m’a marqué durant l’entrevue :
« If you trying to create scarcity where there’s isn’t, you create opportunity for abundance. »
« When you create artificial scarcity, something else comes along to create an economy of abundance. » (19:20)
Il donne l’exemple de l’encodage régional pour les DVD, où aucune valeur n’est créée en voulant limiter la diffusion des DVD par région. En fait, ça donne un prétexte au piratage et à la création de logiciels pour contourner les protections. Si on compare avec l’industrie de la musique, les compagnies de disques continuaient de créer de la rareté où il n’y en avait pas en tentant de conserver le modèle économique de la vente de CD pendant que Napster répondait à un besoin d’échanger et d’obtention de la musique.
Je me pose donc la question pour les bibliothèques universitaires qui possèdent des ressources électroniques protégées, notamment les périodiques électroniques. En voulant créer une rareté sur ces ressources, les fournisseurs et les bibliothèques engendrent la création d’une offre de l’abondance. Il y a évidemment les dépôts institutionnels et les archives ouvertes qui offrent un plus grand accès. Cependant, qu’est-ce qui arrive si les étudiants, chercheurs et professeurs créent des environnements parallèles pour l’obtention des articles? Il est déjà trop tard, car ils existent.
Il y a quelques semaines, Jessamyn West a publié sur son blogue un exemple où quelqu’un a obtenu un article de périodique en publiant un statut sur Facebook demandant si quelqu’un y avait accès et pouvait lui envoyer une copie. En échange, la personne a offrait de faire un don à Médecins sans frontières. J’ai assisté à la même expérimentation l’année dernière quand Silvère Mercier a publié sur Twitter un message comme quoi il n’avait pas accès à un article qui l’intéressait et un peu plus tard il publiait ceci :
Certains affirmeront que ce sont des cas isolés, car ce sont des bibliothécaires qui ont accès à un réseau de leurs pairs pour répondre à ce type de besoin. Cependant, la croissance des réseaux sociaux et l’arrivée de nouveaux outils permettant un partage facile des références bibliographiques comme Zotero et Mendeley ne vont qu’accroître les possibilités d’échanger du contenu illicite.
Demandez-vous, qu’est-ce qui est plus simple pour un utilisateur, obtenir de son réseau un article de périodique ou faire la recherche dans les ressources électroniques de sa bibliothèque?
Comme le disait Rangaswami, si vous créez une pénurie artificielle, vous établissez des conditions pour créer de l’abondance.